Le contexte
Un centre d’hébergement d’urgence est une structure qui permet l'hébergement de toute personne sans domicile fixe, et ce de manière inconditionnelle. Il accueille et héberge, la plupart du temps des personnes qui font face à des besoins urgents voir vitaux, en offrant des prestations de première nécessité. Ce sont pour la majorité de grands dortoirs collectifs, qui offrent un plateau repas unique, à moindre coût. L’intimité, la dignité des personnes accueillies sont mises à mal dans ces espaces restreints, où le manque d’espace exacerbe les différences culturelles ou les problèmes d’addictions. Pour ces raisons, de nombreuses personnes sans domicile font ainsi le choix de ne pas s’y rendre. Au sein de ces centres, les travailleurs sociaux donnent le meilleur d’eux-mêmes afin d'accueillir et d’aider ces personnes en grande détresse.
La plupart des centres d’hébergements n’ont pas de cuisine et les personnes accueillies, parfois à la rue depuis plusieurs années, ne peuvent donc pas cuisiner. Elles sont souvent contraintes de se nourrir de plateaux repas servis en centre ou lors des maraudes, ce qui leur fait perdre toute autonomie concernant l’alimentation. Pour les personnes sans domicile, l’alimentation est avant tout une réponse à un besoin physique appréhendé au jour le jour, faisant ainsi totalement disparaître les notions de repas, de choix et de plaisir.
Ces constats ont été le point de départ du projet pilote de Marie Sénia, qui a travaillé au sein du centre d’hébergement Charles Domercq à Bordeaux. Le centre est situé dans le quartier de la gare Saint-Jean et est opéré par le groupe SOS Solidarités, qui gère 185 établissements et services pour plus de 64 000 bénéficiaires en France.
Le projet
Permettre aux résidents d’avoir accès à une cuisine et retrouver le lien avec la nourriture grâce à la confection de ses propres repas, en faisant leurs courses et leurs propres choix alimentaires : tel était l’objectif du projet. Bien sûr cela implique également de travailler sur les aspects collatéraux de la transition alimentaire des résidents : lien social, autonomie, estime de soi… afin de démontrer comment l’alimentation peut être un levier efficace pour l’insertion durable d’individus en situation d’exclusion.
A la place du traditionnel plateau repas, un chèque-service leur permet de faire leurs courses de manière autonome. En parallèle, grâce à un partenariat développé avec une coopérative locale, des paniers de fruits et légumes de saisons sont proposés toutes les semaines aux résidents.
Chaque résident a accès à une cuisine individuelle et à du matériel afin de (ré)apprendre à cuisiner au quotidien et en toute autonomie. Un espace de cuisine collectif a également été mis en place, au sein duquel sont organisés toutes les semaines des ateliers de cuisine.
Ces ateliers, organisés par Marie Sénia, la porteuse de projet, permet de partager les savoirs et les pratiques, de manière conviviale et ce tout en sensibilisant à l’alimentation durable et en leur permettant de retrouver des repères nutritionnels. Les résidents sont pleinement impliqués dans ces ateliers et participent systématiquement aux courses et à la préparation des repas… afin de retrouver leur autonomie et leur estime de soi.
Exemple d’un déroulé d’atelier type, proposé à un groupe de 4 à 6 résidents :
- choix d’une recette en fonction des fruits et légumes de saison
- courses réalisées en amont de l’atelier
- cuisine avec les résidents
- repas à table avec les résidents et l’équipe socio-éducative
- ménage collectif
Découvrez le podcast avec les retours des résidents sur cette expérience : https://anchor.fm/marie-senia
Les porteurs de projet
Ce projet a été développé par Marie Sénia, au sein de l’antenne de Bordeaux du Groupe SOS Solidarités. Plusieurs partenaires ont rejoint le projet afin d’apporter leur soutien et leur expertise : ERNEST association qui finance l'achats de paniers de fruits et légumes grâce à des collectes auprès de restaurateurs. PHENIX qui collecte des invendus auprès des commerces et les redistribue gratuitement pour les proposer aux résidents au sein de l’épicerie, et REGAL, le réseau local de lutte contre le gaspillage alimentaire.
Résultats
Ce projet pilote a pour objectif de démontrer que l’alimentation peut être un levier d’insertion durable et qu’il peut être répliqué dans d’autres centres en France.
Débuté en mars 2019 lors de l’ouverture du centre, il est actuellement poursuivi dans une démarche d’amélioration continue afin de pouvoir en tirer une analyse d’impact et de créer une méthodologie réplicable dans d’autres centres.
Cette fiche initiative a été rédigée par Louise Galipaud, volontaire LFC - juin 2020.
Dernière modification : 08 Juil 2020.
Groupe SOS Solidarités
Projet innovant développé dans un centre d’hébergement d’urgence pour faire de l’alimentation un levier pour l'insertion durable.