Slow Food Albanie

Le contexte

Slow Food Albanie est une organisation locale faisant partie du mouvement Slow Food, engagé dans la promotion d’une alimentation saine, respectueuse de l'environnement et des traditions locales à travers le monde. Fondée en 1986 en Italie, elle est aujourd'hui présente dans plus de 160 pays. Les objectifs de l’organisation sont multiples: promouvoir une alimentation saine, durable et de qualité en mettant en avant les produits locaux et traditionnels; préserver la biodiversité et lutter contre la disparition des variétés animales et végétales en voie d’extinction; promouvoir la souveraineté alimentaire; sensibiliser à des modes de productions et de consommations durables.

Une part importante de la population albanaise dépend de la production agricole : 38% de la population active travaille dans le domaine de l’agriculture, en majorité dans de petites exploitations souvent confrontées à des difficultés économiques. Malgré la prépondérance de la place du travail de la terre dans le quotidien de la population albanaise, l’agriculture du pays est menacée par les défis environnementaux: déforestation, dégradation des sols agricoles, pollutions, dans un contexte où la production industrielle et la monoculture gagnent du terrain. Face à ces enjeux, protéger les terres agricoles, lutter contre la précarité, œuvrer au développement d’une agriculture durable et résiliente semblent constituer de réelles priorités. Pour répondre à ces problématiques, et après avoir identifié de nombreux chefs engagés autour de la thématique de l’alimentation durable en Albanie que l’organisation Slow Food Internationale a ouvert une branche coordonnée localement.

Le projet

Chaque antenne locale de Slow Food dans le monde est appelé un Convivum, chacune de ces communautés diffusent la philosophie Slow Food à travers plusieurs types d’actions:

• Le soutien aux petits agriculteurs en valorisant leurs initiatives, et en leur permettant de rentrer en contact avec les consommateurs locaux et avec les marchés régionaux dans l’objectif de commercialiser des produits locaux, de saison. Cette approche permet notamment de repenser les chaînes de distribution, en valorisant la mise en réseau et la coopération, et permet d’établir un contact direct avec les consommateurs fidèles, tout en réduisant les impacts liés au transport. 
• La diffusion de connaissances sur les alternatives au système alimentaire en place pour faire évoluer les représentations. L’organisation propose régulièrement des événements et activités (conférences, ateliers, foires gastronomiques, visites de fermes, dégustations de produits locaux) pour sensibiliser les consommateurs et les producteurs locaux à l'importance de l'alimentation durable, à la consommation de produits de saison, aux traditions gastronomiques locales et au tourisme rural responsable.
• L’action du plaidoyer et du lobbying sur les acteurs politiques afin d’impacter les décideurs pour promouvoir des politiques publiques en faveur d’une alimentation plus durable.

Slow Food Chef’s Alliance, une branche de Slow Food fonctionnant comme un réseau pour les restaurateurs travaillant avec des petits producteurs, permet également de mettre en avant les pratiques alimentaires durables en Albanie, en mettant en lumière les chefs engagés et en leur proposant d’afficher le nom des producteurs sur leurs menus. Slow Food soutient ainsi les petits producteurs qui défendent la biodiversité alimentaire et aide à la mise en relation entre acteurs de l’agro-alimentaire pour préserver les cultures culinaires locales. Le Convivium albanais a permis de constituer un réseau de restaurants engagés à travailler avec des produits locaux provenant de petits exploitants agricoles, le réseau compte pour l’instant un vingt-et-un chefs actifs dans le pays.

Les impacts

L’association Slow Food Albania a permis de mettre en lumière de nombreux projets comme celui  de Mrizi i Zanave, une ferme agricole/restaurant située dans la région de Lezha, dans le nord de l'Albanie. La ferme a été fondée en 2006 par la famille Gjergji et a fait le choix de cultiver des produits locaux et traditionnels en utilisant des techniques agricoles respectueuses de l'environnement sur un terrain d’une vingtaine d’hectares. Le restaurant qui a ouvert en 2013 bénéficie de son propre approvisionnement en  fromages, confitures, légumes et vins, elle produit ainsi la majorité des ingrédients proposés au menu. Pour le reste des aliments qui ne sont pas issus de sa propre production, le restaurant travaille en coopération au sein d’un système autonome d’une dizaine de petits producteurs locaux. Le restaurant est devenu, grâce à ses recettes mettant en avant le patrimoine culinaire local et les produits frais, une référence gastronomique dans la région. Mrizi i Zanave dispose également d’un magasin qui propose les produits de la ferme au public ainsi que des activités d’agro-tourisme rural dans l’objectif de soutenir les agriculteurs locaux et les communautés rurales, tout en offrant aux touristes une expérience des traditions et pratiques locales.

Avoir été autonome dans sa production a notamment permis à Mrizi i Zanave de limiter les pertes économiques durant la période de la Covid-19, lorsque les différents fournisseurs du restaurant traversaient une période difficile, en vendant les différents aliments produits en vente directe aux consommateurs. Le restaurant a également proposé aux agriculteurs avec lesquels il travaillait habituellement d’assurer le transport gratuit de leur production afin de les vendre sans frais de livraison aux consommateurs. L’équipe de Mrizi i Zanave témoigne du fait que vivre la période de pandémie les a invités à repenser les liens entre producteurs et consommateurs, et les a désormais convaincus qu’en tant que restaurant, il ne “suffit pas de cuisiner, mais qu’il faut aussi produire”. 

Le "petit plus"

Le combat que mène Slow Food et les acteurs qui collaborent sous sa bannière a également pour effet la réappropriation progressive de la conception du travail de la terre par ses représentants, les métiers paysans étant souvent associés négativement à la pauvreté, et présentés comme honteux en Albanie. Proposer des produits locaux, de qualité, revaloriser les traditions culinaires et collaborer entre acteurs engagés participe, pour Altin Prenga, chef à Mrizi i Zanave, à la fierté de représenter le territoire local et le mode de vie paysan.

Cette fiche initiative a été rédigée par Mathis Kugel, en service civique à Let’s Food en mai 2023.

Dernière modification : 23 Mai 2023.